L’épargne Covid continue de progresser en France. Après une année 2020 marquée par la crise sanitaire, les Français continuent d’accumuler le cash sur leurs comptes en banque et leurs livret bancaires. Fin mars, l’épargne Covid a atteint 142 milliards d’euros, selon la Banque de France, et les Français pourraient mettre encore 38 milliards d’euros de côté d’ici la fin de l’année.
L’épargne covid, un enjeu pour la croissance
Plus d’un an après l’arrivée du virus dans l’Hexagone, les Français ont accumulé des montagnes de cash. La multiplication des périodes de confinement et des mesures de restriction ont limité les possibilités de consommer.
Résultat, les Français ont épargné environ 142 milliards d’euros de plus qu’en temps normal entre la fin du premier trimestre 2020, et la fin du premier trimestre 2021, a estimé mardi la Banque de France. D’ici la fin de l’année, le montant se montera probablement à 180 milliards d’euros.
Selon le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, cette somme représenterait jusqu’à 7 points de PIB, ce qui représente « une réserve de croissance importante pour l’avenir si la confiance des Français s’avère assez forte ».
L’enjeu de ce pactole est donc immense. Le gouvernement espère que les Français dépenseront une partie de cette épargne accumulée dans des produits ou des services, ce qui permettrait de soutenir l’activité et atteindre les 5,7% de croissance économique visés pour cette année.
Si les Français dépensaient 20% de leur épargne pendant la crise sanitaire, la croissance du PIB atteindrait 6% en 2022, affirmait le 15 avril une étude de l’OFCE, qui estimait que l’ « épargne-Covid » devrait représenter environ 160 milliards d’euros.
Taux d’épargne des Français au plus haut
Selon une note de la Banque centrale, il est clair que le surplus d’épargne, s’est constitué surtout lors des mois de confinement en 2020, c’est-à-dire en mars, avril, mai et novembre. Mais son accumulation s’est poursuivie au premier trimestre 2021 précise la Banque de France.
Le taux d’épargne des Français a en effet atteint un plus haut, à 26,8%, au deuxième trimestre 2020, date du premier confinement, selon les données Eurostat du 12 janvier.
L’épargne brute a quasi-doublé par rapport au deuxième trimestre 2019. A l’été 2020, alors que l’on sortait du premier confinement, les Français en ont profité pour partir en vacances et consommer.
Puis, à partir du quatrième trimestre 2020, la situation sanitaire s’est de nouveau aggravée, et les Français, du moins ceux qui le pouvaient ont continué à mettre de l’argent de coté.
Sur l’ensemble de l’année 2020, qui comprenait donc deux mois et demi sans Covid-19, le surplus avait été estimé à 115 milliards d’euros.
Mobiliser l’épargne covid
Faute de pouvoir consommer et face aux craintes des conséquences économiques de la crise sanitaire, les dépôts sur les comptes à vue et sur le Livret A ont bondi à des niveaux jamais vus. Les encours des dépôts à vue ont progressé de plus de 100 milliards d’euros depuis fin 2019, soit une hausse de 20%, a également signalé la Banque de France.
Ce surcroît d’épargne alimente depuis des mois tous les débats. Notamment celui de sa possible taxation. Certains élus de gauche et des économistes proposent en effet d’instaurer une taxe exceptionnelle, dite « covid », sur les ménages les plus aisés, qui sont ceux qui ont le plus épargné, ou sur les entreprises qui ont tiré partie de la crise, comme les géants de la distribution.
Pour mettre fin aux spéculations, Bruno Le Maire, lors d’une récente conférence de presse, a de nouveau affirmé qu’il écartait « une nouvelle fois clairement et définitivement toute taxation de l’épargne des Français ».
Toutefois, transformer cette épargne en consommation ou en investissement dans les entreprises sera un des « défis » de la reprise économique, a-t-il jugé. C’est également le point de vue de nombreux économistes. D’autant que les Français restent craintifs quant à l’avenir.
La France sort de la crise
La Banque de France est optimiste pour 2021. L’activité devrait ainsi retrouver son niveau d’avant crise un peu plus tôt que prévu, soit dès le début 2022.
Pour le gouverneur de la Banque de France, l’économie française est en voie de sortir de la crise. La croissance française atteindrait 5,75 % en 2021, soit davantage que la moyenne européenne à 4,6%, et bien mieux que l’Allemagne et l’Italie.
La consommation des ménages et l’investissement des entreprises, grâce au retour de leur confiance, devraient constituer les deux moteurs de ce rebond.
En ce qui concerne l’inflation, qui a atteint 1,4% au mois de mai selon l’Insee, le gouverneur de la BdF ne semble pas trop inquiet. En revanche, il est plus préoccupé par l’emploi et les difficultés de recrutement des entreprises. Ce dernier point concernerait près de 40% des sociétés interrogées en juin, alors même que la France compte trois millions de chômeurs.
« L’inadéquation entre compétences et emplois représente depuis des années le principal frein à la croissance française : notre pays n’a surtout pas besoin de dépenser davantage, ni même d’investir tellement plus, mais avant tout de former mieux et de rendre le travail plus incitatif », expliquait François Villeroy de Galhau lors d’une récente interview donnée au Figaro.
En ce qui concerne la situation des entreprises, le bilan n’est pas aussi mauvais qu’on le prévoyait. Elles sont « dans un état plutôt meilleur que ce que l’on pouvait craindre », a-t-il précisé.
En revanche, il a pointé le fait que 6 à 7 % des entreprises ont vu leur dette augmenter et leur trésorerie diminuer. Ceci, alors que leur situation avant crise en la matière était déjà préoccupante. Pour autant, la Banque de France ne croit pas au scénario de faillites massives.