Le gouvernement a fixé sa cible d’inflation à 4 % pour 2023. La BCE, elle, espère à terme pouvoir descendre sous la barre des 2 %. Mais pour atteindre cet objectif, une politique monétaire adaptée devra être mise en place pour stimuler l’économie en utilisant par l’outil de l’assouplissement quantitatif. Mais au vu de la situation actuelle, il semblerait bien que la France et l’Europe entrent dans une nouvelle phase que l’on nomme le tapering en économie.
Qu’est-ce que l’assouplissement quantitatif ?
La période que nous traversons actuellement est historiquement complexe. Un taux d’inflation record, une récession qui montre ses premiers signaux et une consommation en baisse un peu partout en France, mais aussi dans le monde.
L’assouplissement quantitatif ou quantitative easing concerne la politique monétaire par laquelle la banque centrale rachète des emprunts publics dans le but d’injecter de l’argent dans l’économie et de stimuler la croissance. Pour rappel, la dette publique en France est à plus de 110 % du PIB soit plus de 2 900 milliards d’euros.
Il faudra attendre 2001 pour voir sa toute première application dans le monde. Nous sommes vingt ans plus tard et la question se pose à nouveau. C’est alors que l’investissement bat son plein pour tenter d’endiguer le ralentissement économique.
De nombreuses études sur le sujet ont démontré que l’assouplissement quantitatif (AQ) fonctionne. Pour rappel, c’est ce mécanisme monétaire qui a été mis en place dès le début de la crise sanitaire du covid-19. L’Europe donc, mais aussi les États-Unis ou le Japon utilise le AQ comme solution économique.
Qu’est-ce que le tapering en économie ?
Le tapering intervient après un assouplissement quantitatif, c’est la raison pour laquelle il est important d’en évoquer le concept. Pour faire très schématique, la banque réduit ses rachats en dette publique et resserre sa politique budgétaire.
Le tapering peut avoir un impact significatif sur l’économie d’un pays. Lorsque les responsables de la Banque centrale européenne (BCE) ou de la Banque centrale des États-Unis (Fed) estimeront que l’économie est suffisamment stable, ils utiliseront la réduction progressive pour rééquilibrer la balance monétaire.
Dans les faits, il s’agit d’une hausse de taux d’intérêt pour mettre un frein à une inflation hors de contrôle comme c’est le cas aujourd’hui avec un taux d’inflation 2022 record.
La France devrait entrer en récession
Cela fait plusieurs mois qu’on annonce l’arrivée d’une récession économique dans notre pays.
Nous étions en juillet dernier et déjà, les économistes avaient avancé l’idée de l’installation durable de cette dernière. Pour qu’il y ait récession, il faut un recul du PIB sur deux trimestres consécutifs.
Nous y avons échappé de peu pendant l’été, cette fois-ci tout semble indiquer que nous y entrons sans résistance aucune.
Marc Touati, économiste français, déclare qu’elle pourrait arriver avant la fin de l’année et se poursuivre au rythme de 2022.
Marc Touati nous rappelle que nous semblons nous être habitués à une inflation à 6 %, alors même que ce taux est historique depuis presque trente ans. Une situation qui stagne ne veut pas dire une situation qui s’améliore.
En France, le bouclier tarifaire amoindrit les effets de l’inflation sur notre pouvoir d’achat, mais pour combien de temps ? Car effectivement la question se pose.
Combien de temps exactement le gouvernement pourra-t-il suivre une politique monétaire altruiste alors même que la recette devrait largement être en baisse courant de l’année prochaine ?
On peut chiffrer le coût du bouclier fiscal seul, à 30 milliards d’euros par an pour simplement tenter de contrer quelques dixièmes de pour cent.
L’assouplissement quantitatif sera-t-il suffisant pour contrer une possible stagflation ?
De nombreux économistes affirment que nous allons entrer dans une phase de stagflation c’est-à-dire à la fois une période de récession et tout ce qu’elle engendre et à la fois une inflation élevée. Un phénomène économique très complexe et difficile à vivre pour les ménages. En effet, les prix sont à la hausse, les salaires n’augmentent pas lorsqu’ils peuvent être conservés et les pertes d’emplois se multiplient.
Arrive alors la théorie du keynésianisme, où pour régler la situation, le gouvernement devra soutenir certains acteurs au détriment des autres.
Les familles les plus modestes sont évidemment les plus exposées dans ces périodes.
À ce stade, la stagflation n’est qu’une perspective, une hypothèse, pourrait-on dire, mais les premiers signes sont bien là. Une augmentation générale des prix est généralement suivie d’une hausse des taux d’intérêt. Le taux d’inflation de la zone euro était de 9,9 % en octobre (6 % pour la France) et les taux d’intérêt explosent après avoir, une partie de l’année dernière, frôlé les 0 %.
L’assouplissement quantitatif va engendrer une baisse significative des taux d’intérêt sur les obligations d’État qui se traduit ensuite par une baisse des taux d’intérêt sur les prêts des particuliers et des entreprises. Plus d’investissement, mais aussi plus de consommation de la part des ménages.
Les indicateurs avancés d’une situation économique qui ne s’arrange pas
Nous devrions assister à une nouvelle envolée inflationniste. D’une part parce que les coûts de production ont augmenté de 43 % alors que les prix eux ne l’ont été que de 6 à 7 % maximum. Une perte de marge directe pour les entreprises qui devraient le répercuter très vite sur leur prix. Il faut mettre cela en perspective avec la possible baisse des aides de l’État.
En effet, si les prix n’ont pas suivi la hausse des prix à la production, c’est notamment en raison du soutien du gouvernement. Pour vendre, il faut rogner sur sa marge commerciale, mais sans aide financière Cela restera-t-il possible ?
Le glissement annuel des prix à la consommation montre également que les prix pourraient atteindre un nouveau record inflationniste dans la zone euro avec 13 % en moyenne contre 9,9 % actuellement.
Les projections économiques pour demain
Après plusieurs mois d’inflation, puis l’entrée dans cette période de stagflation, on peut facilement dire qu’il y a eu du laisser-aller du côté de la BCE.
La crise énergétique ne remonte pas uniquement de la guerre en Ukraine, elle remonte bien avant avec la volonté de l’Allemagne à réduire sa part de nucléaire. C’est ce type d’indicateurs que la banque centrale aurait pu et dû prendre en compte pour mettre en place des mécanismes économiques pour prévenir de l’inflation.
La crise du covid avait donné lieu à un assouplissement quantitatif exceptionnel. Des rachats de dettes records à la baisse de taux directeurs, parfois même négatifs, le pire a donc été évité.
Le spectre d’une inflation durable engendre petit à petit le resserrement de la politique monétaire de la BCE avec des mesures qui tendent à reprendre le contrôle sur l’envol des prix. Ce changement se fait déjà ressentir avec l’augmentation significative des taux directeurs et d’emprunt.
Le pire scénario est celui évoqué précédemment à savoir celui de l’hyperinflation avec une récession extrêmement importante et des entreprises en défaut de paiement. Des États aussi qui rencontreront la plus grande difficulté à rembourser leur dette.
Une inflation contrôlée permet aux entreprises de conserver leur marge et de maintenir leur activité. Une inflation trop élevée, c’est le phénomène contraire qui se déroule avec de nombreuses activités en danger.
L’objectif pour demain est de faire baisser les prix tout en garantissant la demande et en maintenant l’équilibre boursier. Un casse-tête économique et monétaire dont la résolution peut amener à un retour vers une croissance forte ou un effondrement lissé dans le temps.
Les banques centrales ainsi que les gouvernements ont encore quelques semaines pour trouver la formule adaptée à une situation économique sur le fil.