La facture de la crise sanitaire va être lourde pour les finances publiques françaises. Selon les déclarations d’Olivier Dussopt, le ministre de l’Action et des Comptes publics, recueillies par Le Figaro, la crise sanitaire va coûter au total à la France 424 milliards d’euros en 2020, 2021 et 2022. Ces sommes comprennent des baisses de recettes fiscales et les dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire comme le fonds de solidarité et le chômage partiel. Le chiffre se décompose en 158 milliards d’euros pour l’année 2020, 171 milliards pour cette année (dont 56 milliards dédiés aux mesures d’urgence), et 96 milliards d’euros en 2022.
Déficit public: 9,2% du PIB en 2020
Le coût économique de la crise a atteint 158 milliards d’euros l’an dernier et le déficit public 9,2% du PIB, entre les baisses de recettes fiscales et les dépenses engagées pour aider les secteurs en difficulté (le chômage partiel, le Fonds de solidarité…).
L’année 2020 s’est toutefois terminée avec une dégradation moins importante que ce que nous avions craint », estime Olivier Dussopt. « La récession a atteint 8,2% au lieu des 11 % anticipés en fin d’année dernière », précise le ministre des Comptes publics. Les recettes fiscales ont été plus dynamiques que prévu et 350.000 emplois seulement ont été supprimés, contre 900.000 suppressions attendues. « Quant au pouvoir d’achat des ménages, il a augmenté de 0,6 % en moyenne en 2020. Tout cela montre que les mesures que nous avons prises étaient efficaces et que nos choix étaient les bons », se félicite Olivier Dussopt dans Le Figaro. Cette année, la facture atteindra 171 milliards d’euros et 9% de déficit public. Les mesures d’urgence représentent 56 milliards sur le total. Enfin, en 2022, le coût représentera 96 milliards d’euros pour l’Etat, et un déficit de 5,3% selon les prévisions de Bercy.
C’est ce total de 424 milliards d’euros, représentant la facture de la crise sanitaire sur 3 ans, qu’Olivier Dussopt a inscrit dans le programme de stabilité, qui sera envoyé à Bruxelles dans quelques jours. Mais derrière ce discours optimiste, les critiques pointent.
Crise sanitaire: la Cour des comptes reste critique
En mars 2020, alors que la crise sanitaire frappait de plein fouet l’économie française, Emmanuel Macron reprenait la formule déjà employée par l’ancien président de la Banque centrale européenne, Mario Dragui en déclarant : « Tout sera mis en œuvre pour protéger nos salariés et nos entreprises. Quoi qu’il en coûte ». Dans son rapport publié mardi sur le budget 2020 de l’Etat, la Cour des comptes critique la façon dont Bercy a piloté ce « quoi qu’il en coûte » promis par le président français, et épingle un « manque de réalisme des prévisions budgétaires ». En cause : des aides aux entreprises dont l’exécutif aurait exagéré les montants pour rassurer politiquement les Français, oubliant au passage les règles usuelles de prudence budgétaire.
La Cour des comptes pointe une hausse inédite des dépenses l’an dernier « que n’explique pas uniquement la crise sanitaire ». En clair, Bercy a aussi laissé filer les dépenses hors Covid, comme l’illustre le fait que « les effectifs de l’Etat sont repartis à la hausse […], à rebours des deux années précédentes ».
Elevé au rang de doctrine, ce « quoi qu’il en coute » est aujourd’hui regardé avec des yeux bien plus critiques. « Cette formule, c’est devenu un piège, admet un conseiller de l’exécutif. Elle a accrédité l’idée que l’argent est là et qu’on peut le dépenser ». La dette s’accroît et certains commencent à s’inquiéter car tôt ou tard, il faudra bien la rembourser.
Pas d’augmentation des impôts
L’an passé, les dépenses n’ont pas tant inquiété car le pays était dans l’urgence. Mais à présent, certains s’interrogent quant à la destination des aides. Seront-elles bien utilisées ?
Le gouvernement prévoit d’aider les entreprises et les Français « tant que la crise durera », affirme Olivier Dussopt. L’an prochain, la priorité est donnée au plan de relance, affirme le ministre chargé des Comptes publics, pour « son exécution totale en 2022 ».
Par ailleurs, le gouvernement envisage un retour du déficit sous la barre des 3% en 2027, en limitant la hausse des dépenses à 0,7% par an, précise le ministre dans le Figaro. « Pour tenir cette trajectoire, nous avons bien conscience qu’il faudra mener des réformes structurelles. Au-delà de l’emblématique dossier des retraites, nous avançons aussi sur certains dossiers techniques », avance Olivier Dussopt, notamment sur les dépenses au sein des ministères. « Ce qui est sûr en tout cas, c’est que nous excluons d’augmenter les impôts », affirme le ministre. Cette affirmation, répétée depuis pratiquement le début de la crise, laisse plusieurs économistes dubitatifs. Avec une dette publique représentant 120% du PIB, la question se pose.
Fin mars, Bruno Le Maire évoquait l’idée de consacrer une part des recettes futures de l’impôt sur les sociétés au remboursement de l’importante dette publique générée par la crise sanitaire. On parle ici d’affectation et non d’augmentation des impôts.