La variation des prix des biens et des services a toujours plus au moins varié lors des 50 dernières années. Mais la situation actuelle semble quelque peu différente.
En effet, l’accumulation de signaux économiques et sociaux renforce la crainte des marchés financiers, mais aussi celles des petits épargnants. Dans une telle situation, comment protéger la valeur de son épargne de l’inflation ?
Sommes-nous entrés dans une hyperinflation ?
De nombreux économistes affirment que nous pourrions passer d’une période d’inflation à celle de l’hyperinflation. Cette dernière a des causes mais aussi des effets différents de l’inflation que nous connaissons depuis presque une année d’augmentation des prix.
Pour rappel, l’inflation 2022 a battu tous les records depuis 40 ans. En effet, il faut remonter à 1985 pour observer une hausse de 5,8 % d’inflation soit un niveau comparable à celui d’aujourd’hui. La crise de 2008 alors connue comme la dernière grande crise économique de notre siècle n’avait enregistré que 2,8 % de hausse.
L’hyperinflation est un terme économique pour décrire une augmentation rapide, excessive et hors de contrôle des prix. Alors que l’inflation est plus ou moins prévisible en suivant l’évolution des prix des biens et services, l’hyperinflation ne l’est pas. D’un mois sur l’autre, il n’est pas rare de voir les prix passer du simple au double.
Il est sans doute excessif de parler d’hyperinflation, ou simplement trop tôt, l’avenir nous le dira. Toutefois, si l’on s’éloigne d’une vision globale et que l’on regarde la tendance haussière des biens, de manière séparée, l’augmentation parait bien hors de contrôle notamment dans le secteur comme celui de l’énergie. Le tarif à la pompe a littéralement explosé depuis quelques mois, et que dire de celui de l’électricité. Le gaz a quant à lui pris 22 % en un an.
Si la demande maintient un niveau supérieur à l’offre, la production ne pourra pas suivre et l’on assistera à une tendance haussière extrêmement brutale des matières premières et autres biens essentiels de consommation.
Il est tout de même important de rappeler que l’hyperinflation fait partie des pires scénarios et que ce phénomène économique est relativement rare, mais suffisamment important pour ne pas écarter cette possibilité.
Conséquence de l’inflation sur l’épargne
Alors que l’on pourrait penser que la solution pour protéger son épargne de l’inflation serait de réduire sa consommation, ce n’est malheureusement pas toujours aussi évident que cela. L’inflation a un impact direct sur les économies des Français et des effets indirects, plus insidieux, qui grappillent petit à petit la somme d’argent épargné.
Lorsque les prix augmentent excessivement, la valeur monétaire baisse. L’épargne conservée sur un compte bancaire ne rémunère pas suffisamment pour se protéger de l’inflation. À titre comparatif, le taux du livret A est actuellement à 2 % alors que l’inflation a grimpé à 6,2 %. Un différentiel qui fait perdre du pouvoir d’achat au quotidien. Si le prix d’une baguette de pain a une conséquence minimum sur le niveau de vie des Français, celui du carburant représente déjà des centaines d’euros en moins à la fin du mois.
Dans une situation instable comme nous la connaissons aujourd’hui, il n’est pas rare de voir des avis divergents sur des questions pourtant essentielles.
Il y a une incertitude sur la croissance. Le gouvernement vient d’annoncer ses prévisions pour cette fin 2022 avec une croissance estimée à 2,7 % du PIB et 1 % en 2023. Des prévisions confirmées par certains experts, mais contestées par d’autres qui annoncent déjà l’arrivée d’une récession pour le début de l’année.
Une incertitude sur l’inflation également. Durable ou non ? Difficile de répondre. On peut observer un consensus sur la possibilité de voir une amélioration de la situation économique d’ici à 18 mois. D’autres spécialistes n’hésitent pas à affirmer que nous devrons nous habituer à une augmentation des prix généralisée et durable.
Pour finir, ce sont des interrogations qui portent sur la hausse des taux d’intérêt qui animent les débats actuels. Si la récession s’installait, les taux devraient alors suivre la même tendance. Faux ! répondent certains économistes qui pensent que la baisse des prix ne sera pas assez importante si elle se produit et que les banques devront, de fait, afficher des taux d’intérêt plus élevés pour absorber l’écart concernant les prêts accordés.
Placement anti-inflation : quelle classe d’actif choisir ?
Avec une telle hétérogénéité des points de vue, protéger ses économies de l’inflation n’est pas toujours évident. Par manque de connaissances ou par peur de voir son argent s’envoler au même rythme que l’inflation de nombreux investisseurs préfèrent attendre ou épargner. Il parait tout de même intéressant de répartir son argent sur différentes classes d’actifs que l’on appelle aussi placement anti-inflation permettant de contrer la hausse des prix d’un côté et la perte de valeur de la monnaie de l’autre.
Deux critères à prendre en compte pour investir pendant l’inflation
Pour bien choisir sa classe d’actif pendant une période inflationniste, il convient de se demander quels investissements sont ou ne sont pas cycliques dans leur revenu et lesquels sont indexés sur les prix.
- Investissement cyclique : revenus des entreprises qui dépendent très largement de l’activité économique. La mode ou les entreprises évènementielles par exemple ont une croissance indexée à la santé de l’économie d’un pays.
- Revenus indexés sur l’inflation: l’immobilier correspond en partie à ce principe économique puisque les loyers sont indexés sur l’indice des prix de la consommation. C’est très souvent d’ailleurs l’une des causes principales de la faillite des entreprises qui ne s’explique pas par baisse de leur activité, mais en raison d’un loyer qu’ils ne sont plus en mesure de payer. Mais attention, nous le verrons un peu plus tard, la hausse des loyers est loin d’être suffisante lorsque l’inflation atteint un niveau exceptionnel comme aujourd’hui.
Les meilleurs investissements anti-inflation
On distingue plusieurs actifs présentant un intérêt certain pour protéger son épargne contre l’inflation.
Faut-il acheter des actions pendant une crise économique ?
Investir en bourse parait être une solution très intéressante et pour cause. Les entreprises vont chercher à défendre leurs profits. La révision des prix de leurs biens ou services à la hausse pour garantir une marge équivalente.
Actuellement, on assiste même à une surindexation des dividendes au prix. Cela signifie que lorsque l’inflation augmente de 1 %, la croissance des dividendes est supérieure. Dans le contexte tel que nous le connaissons, investir une partie de son épargne en bourse semble être la réponse adéquate à cette hausse des prix inconsidérée et incontrôlable ainsi qu’à la dévalorisation de l’épargne bancaire.
À noter que l’indexation des actions sur l’inflation signifie également que la valeur des titres peut reculer. Il s’agit de creux d’actions mais qui sont très vite compensés soit par un retour à la normale des prix et donc une reprise de la croissance soit par un redémarrage inflationniste.
Immobilier et inflation, font-ils bon ménage ?
L’immobilier répond partiellement à deux des critères évoqués pour protéger son argent de l’inflation. Toutefois, l’indexation au prix est discutable. En Europe et sur l’année 2022, on observe une augmentation de l’indice des prix à 8 % en moyenne alors que les loyers, eux, n’ont suivi qu’à hauteur de 2 % cette hausse généralisée. En France, la situation est sensiblement la même avec des loyers qui ont globalement stagné ne permettant pas de contrer un quelconque effet de la crise. Il ne faut pas oublier que certaines villes comme Paris ou Lille pratiquent l’encadrement des loyers pour éviter les abus. Ainsi, les investisseurs locatifs ne peuvent pas toujours répercuter le taux d’inflation sur le loyer.
Il faut également prendre en compte le maintien de la tendance haussière des taux d’intérêt qui devraient rendre un peu plus instable un marché qui tend, tant bien que mal, à résister.
L’investissement vert fait sa révolution face à l’inflation
Très souvent considérés comme mal-aimés, les investissements durables semblent avoir repris la main dans un jeu qui les avait exclus pendant trop longtemps. La transition énergétique est un enjeu à la fois écologique évidemment mais également économique. Les sociétés de matériel de production d’électricité verte, de logistique optimisée ou d’infrastructures écoresponsables ont le vent en poupe.
Contrairement à l’investissement plus exposé à la crise, le marché de l’énergie renouvelable n’est pas cyclique ou peu, c’est-à-dire que face au défi gigantesque auquel nous devons faire face, les entreprises n’arrêtent pas d’investir et de se développer même dans une période difficile et incertaine. On peut alors soit passer par des fonds d’investissement, soit acheter directement les actions de ces sociétés à vocation écologique.
Quid du private equity ?
Le capital-investissement ou private equity de sa désignation anglo-saxonne, désigne le fait d’investir dans des entreprises non cotées en bourse. Il s’agit de prendre des parts au capital de sociétés lors de levées de fonds. On parlera ici d’investissement des start-ups ou TPE/PME qui peut se faire via l’ouverture d’un PEA (plan d’épargne en actions) ou en s’adressant aux fondateurs pour ceux ne souhaitant pas passer par un intermédiaire financier.
Le rendement du private equity avoisine les 11 % par an lissé sur 15 ans. En France comme aux États-Unis, on compte deux fois plus d’entreprises non-cotées que de sociétés cotées permettant un éventail d’investissement très intéressant.
L’avantage principal du private equity réside dans le fait qu’il n’est pas soumis aux fluctuations du marché comme peuvent l’être les actions et a donc une moindre volatilité. À noter toutefois que l’inflation a une incidence sur le nombre de créations d’entreprises ou l’innovation de ces dernières.
Les temps de crises sont aussi des périodes où les entrepreneurs et investisseurs sont davantage frileux avec des échanges monétaires au ralenti.
Les obligations indexées sur l’inflation
De quoi parle-t-on ? Très simplement, il s’agit dans la grande majorité du temps d’acquérir une part de la dette publique des États, à la différence des émissions de dettes souveraines classiques dont le montant des coupons est directement indexé sur l’inflation. Le gain ou la perte potentielle réalisés par l’investisseur sur la part de dette variera évidemment en fonction du taux courant de l’inflation au moment de vendre ces obligations.
Attention tout de même, acheter des obligations d’État n’est intéressant qu’au-delà de 3 % au vu de la situation actuelle. En deçà, et ce malgré une ascension du taux, mieux vaut se retenir pour le moment.
Protéger son épargne contre l’inflation par l’investissement
Vous l’aurez compris, c’est ici tout le sujet de cet article. Pour ne pas voir ses économies fondre au même rythme que l’inflation monte, l’investissement est la réponse anticrise la plus pertinente à condition de bien choisir ses classes d’actifs.
Comme évoqué précédemment, la bourse est largement à considérer, comparée aux autres types d’investissement. L’immobilier résidentiel que l’on pensait insubmersible montre quelques failles notamment sur du locatif. Quant aux obligations, le taux à 3 % comme l’on peut le voir sur la dette souveraine italienne est loin de concerner tous les états. Début août 2022, le taux des obligations françaises n’était que de 1,3 %.
Si de nombreux experts misent sur une récession à l’horizon 2023, nous ne savons pas encore si cela va se produire, ou combien de temps cela peut durer. Les marchés financiers en ont vu d’autres et ont toujours su rebondir malgré des perspectives extrêmement négatives comme ce fut le cas en 2008 durant la crise des subprimes aux États-Unis et plus récemment en 2018 après l’annonce du premier confinement. La meilleure manière de se protéger de l’inflation est de continuer à faire ce que l’on faisait avant, investir intelligemment.
Trois conseils avant de placer son argent :
– se renseigner sur la classe d’actif ;
– n’investir que ce que l’on est prêt à perdre ;
– avoir un horizon temporel à long terme.